Il a tenu un journal de guerre, les cahiers de K. Zehmisch,
chef de la Kommandantur de Warneton, sont restés secrets durant 80 ans. Ils
recèlent une mine de renseignements.
Les hasards de la vie ont rendu célèbre cet officier
allemand, que rien ne prédestinait à jouer les guerriers. Arrivé à Warneton en
octobre 1914, il tient au quotidien un journal de guerre qui s’étend jusqu’en
1918. Il ramène ces textes en Allemagne et personne n’en connaît l’existence.
Ce n’est qu’en 1997, lors de travaux de rénovation à la
toiture de la maison familial, que l’un de ses deux fils, Rudolf, découvre les
cahiers, accompagnés de photographies et de documents.
Désireux de contribuer à l’Histoire et d’honorer la mémoire
de son père, il se déplace à Warneton et à Ypres et offre les documents, de
même qu’une collaboration, pour les exploiter. En effet, l’officier allemand a
rédigé dans une sténo d’époque, difficilement déchiffrable. Grâce à un ancien
professeur, Rudolf finit par décoder l’écriture et la transcrire en allemand
moderne. Né en 1927, aujourd’hui encore, il continue à s’intéresser à l’œuvre
de son père.
Or, dans les écrits, il est fait mention de la trêve de Noël
et d’un semblant de match de football, même si rien n’est vraiment clair.
«Grâce à l’intérêt de la BBC pour ces événements, début des années 2000, Kurt
Zehmisch devient l’emblème des fraternisations.»
Tout comme Bruce Bainsfather, du côté anglais. Jamais ces
deux soldats n’auraient pensé que leurs descendants se rencontreraient sur les
lieux mêmes, quand, début des années 2000, Rudolf a serré la main de Barbara
Littlejohn, la fille du caricaturiste.
Le sauveur des stalles de Warneton, mais venons-en aux écrits proprement dits,
obstinément traduits par Francis De Simpel, aidé par Christine Sieuw et Céline
Dumont.
Qu’en retenir? Certainement que Kurt Zehmisch s’est pris
d’amour pour «son cher Warneton». On lui doit d’ailleurs le sauvetage des
œuvres d’art de l’église. Début 1916, quand les bombardements assaillent
l’édifice, il fait évacuer les stalles baroques de 1714, la chaire de vérité et
d’autres objets. Par chemin de fer, tout est mis en sûreté dans le béguinage de
Courtrai. Après la guerre, dix-neuf stalles seront replacées dans la nouvelle
église.
Il décrit aussi les conditions météorologiques, les
activités de remise en état des tranchées, les périodes de détente à l’arrière
du front quand il se rend à Quesnoy-sur-Deûle ou à Lille, etc. De même que les
fêtes de Noël, assez fastes.
Durant près de deux heures, appuyant la parole sur photos et
documents, le conférencier a emmené le public sur un sol qui lui est habituel,
où résonnait il y a un siècle le bruit des bottes allemandes.
Un universitaire, entre lettres et armée. Né en Saxe, en
1890, Kurt Zehmisch fréquente l’université, département des langues, en
français et en anglais. On le retrouve en 1913 à Boulogne-sur-Mer pour
perfectionner son français.
Alors qu’il a entrepris une formation militaire, il est
incorporé dans le 134e régiment royal saxon et vient avec son unité à Warneton
en octobre, comme lieutenant. En septembre 1915, il est nommé commandant de
place à Warneton, sans doute grâce à sa connaissance du français. Il loge dans
la maison du bourgmestre Pierre De Simpel, dans la rue éponyme. Il y reste
jusqu’en mars 1916 où il part pour la Somme. Il est de retour en octobre 1916,
puis repart en juillet 1917. Son journal mentionne un passage de quelques
jours, en 1918.
Démobilisé, il reprend ses études et, diplômé, il enseigne
les langues. Il revient à Warneton dans les années 1925-1930 et prend de
nombreuses photos de la reconstruction.
En 40-45, il enfile l’uniforme et on le retrouve sur le
front russe où il est porté disparu en novembre 1946.
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